Courir plus d’une heure trente minutes et avaler à un rythme " pépère" 20 kilomètres constitue quand même une performance assez rare.
Je pense cela car, au fond, très peu de personnes s’engagent et demeurent dans ce type d’aventure. Pour certains la distance fait peur, pour d’autres moins. Ceux là franchissent la ligne de départ le cœur plein d’allégresse, à l’arrivée peu d’entre eux éprouvent du plaisir. Il est vrai que la grâce ne se livre qu’avec parcimonie.
La course pédestre, on y vient tardivement et on s’y installe pour peu de temps. La souffrance endurée décourage d’y revenir. Mais pour les quelques élus la découverte de ce sport s’apparente à une drogue dont il est difficile de s’affranchir par la suite. Ces adeptes de la course se préparent avec assiduité et minutie comme le font les athlètes de haut niveau. Rien n’est laissé au hasard. Tout est prévu jusqu’au moindre détail. Ce qui importe c’est de franchir la ligne d’arrivée en relativisant le chrono réalisé. La performance s’identifie d’abord à la distance. C’est très estimable.
Courir le plus vite possible 20 kms représente une autre forme de performance.
Là, ce qui compte n'est pas de participer mais bien de gagner. Quand j’écris gagner je veux exprimer par là l’envie de réaliser « un chrono ». L’idée n’est pas de finir mais bien de donner le meilleur de soi. C’est ce que je définis comme « la performance dans la performance ».
On ne se contente pas d’aller jusqu’au bout, on y va le plus vite possible. Pour satisfaire cette ambition, il faut s’entraîner dur. Pas question de tricher avec soi même. Pas question non plus d’additionner simplement les kilomètres à l’entraînement mais bien de les parcourir à l'aide d'une programmation pré-établie. C’est contraignant et éprouvant à la fois. La déception est souvent au rendez-vous. Dans ce type d’effort il faut savoir qu’on atteint rapidement ses limites. Les repousser s’avère presque illusoire. Les progrès sont infimes et le moindre imprévu compromet facilement la performance visée. Mais quand celle ci est au rendez-vous, le plaisir qu’on en retire est immense. Bien entendu cette façon d'appréhender la discipline comporte des risques. La blessure n’est jamais loin. Il convient pour cela d’être vigilant avec son corps. Mais, si l’ambition affichée est souvent chimérique et la satisfaction rare, repousser à chaque sortie ses propres limites représente aussi une attitude hautement appréciable.
La sagesse commande le détachement de toutes choses dont celle de la performance. Pourtant, beaucoup de choses admirables ont été faites par des personnes déraisonnables. C’est à chacun, en conscience, de choisir la voie qui lui paraît la meilleure. Celle de la performance ou celle de « la performance dans la performance ».