Pourquoi Henri qui n’a jamais été sportif dans sa jeunesse réalise-t-il de meilleurs chronos que Paul qui a toujours eu la réputation d’être un bon sportif ?
Henri, de retour chez lui, une fois la course terminée :
- Chérie ! Chérie ! Tu te rends compte je suis allé plus vite que Paul ! Tu te rends compte, plus vite que Paul ?
- Oui, et alors ?
- Paul ! Mais il a toujours été pour moi un véritable sportif, je n’en reviens pas, c’est incroyable.
Hé oui, Paul qui a toujours été le meilleur au foot, qui driblait tout le monde, marquait des buts, nageait à la perfection et avait au tennis le meilleur coup droit de tous les membres du groupe d’amis, Paul, au semi marathon, s’est fait dépasser par Henri.
Comment expliquer cela ? Je vais tenter d’apporter, en toute humilité, d’autres auront sûrement un autre avis que le mien sur la question, une réponse à cette interrogation en développant trois points de vue complémentaires :
- Sans avoir à l’esprit d’inférioriser la course à pied par rapport aux autres disciplines sportives, je pense, peut être me trompe-je, que, dans un premier temps, la performance dans ce sport réside essentiellement dans la volonté. Bien entendu d'autres qualités peuvent êtres amenées à s'exprimer par la suite comme celle de la stratégie de course mais ces qualités ne concernent que les coureurs chevronnés. Je dis cela car je considère que les aspects techniques et tactiques demeurent limités. En effet, pas besoin d’une technique particulière pour courir, il suffit de mettre un pied devant l’autre, et pas besoin non plus d’avoir un sens tactique très aiguisé pour mener à bien sa course, il suffit de suivre la route.
- Cela dit, on retrouve cette unité de mesure sur le plan physiologique. En effet, la principale qualité physiologique qu’un coureur doit détenir pour être performant est la qualité d’endurance. La force, la vitesse, la puissance, la résistance et la souplesse même ne sont pas utiles pour réussir. Et cette unité de mesure alliée avec la précédente, le mental, fait que le jogging est un sport qui s’offre à tous. Les qualités, mentale et d'endurance, permettent ainsi à ceux qui n’ont jamais cru en leur potentiel physique de l’exprimer avec succès et ce fait nouveau dans leur existence est très grisant pour eux. Ainsi, la révélation d’un potentiel physique, ignoré jusque là, les réhabilite avec leur corps, et renforce d'autant leur force mentale au point de rivaliser voire de dépasser ceux qu’ils considéraient hier encore comme leur maître dans ce domaine.
- C’est ainsi, par exemple, qu’être, adroit aux sports de balles, bon tacticien sur une aire de jeu, bon aux cents, deux cents mètres, allier technique et grande capacité de résistance à l’effort intense pendant moins de trois minutes, ne permet pas, pour autant, d'être un bon coureur de fond. L’endurance, n’est pas la résistance qui elle-même n’est pas la vitesse et ainsi de suite. Cela dit, quand Henri se retrouvera face à Paul sur un terrain de foot, l’ordre hiérarchique établit au départ ne se modifiera pas, Henri driblera toujours aussi aisément Paul mais entre temps il aura appris à ses dépends que, dans une autre discipline, Paul, même s’il ne possède pas une bonne touche de balle, lui est supérieur.
Pour finir, je rajouterai qu'il arrive souvent à ceux qui autrefois, dans leurs jeunes années, étaient considérés comme des sportifs accomplis dans une discipline déterminée, abordent tardivement la course à pied par défaut. Ceux là pensent : « je cours parce que mon corps ne me permet plus d’exercer mon sport favori » et cet état d’esprit est incompatible avec la performance sportive. Pour « faire une perf » il faut se donner à fond, sans retenue, avec plaisir et en toute confiance. Je pense que c’est bien cet état d’esprit qui prévaut souvent chez ceux qui découvrent la compétition sur le tard et qui les rend si performant. En d’autres termes, ils sont « tout neuf » !